I Les déséquilibres actuels de la croissance
La croissance économique (hausse durable de la production de biens et services) s’accompagne de nombreux déséquilibres qu’il convient de repérer et d’analyser pour mieux les combattre :
- A. Les inégalités sociales
Tout d’abord, des déséquilibres sociaux plus ou moins conséquents entre les nations mais aussi à l’intérieur de celles-ci, aboutissant à des écarts de revenus parfois importants entre les plus riches et les plus pauvres.
Par exemples au niveau mondial :
_ le PIB par habitant était 20 fois plus élevé en Amérique du Nord qu’en Afrique subsaharienne en 2010. Mais ces inégalités ont tendance à se réduire depuis 30 ans.
_ Le taux de scolarisation dans le secondaire est de 90% dans les PDEM et 54% dans les PED. Mais le nombre d’analphabètes dans le monde continue à se réduire (800 millions en 2008).
_ A peine 3% des populations rurales des PMA ont accès à l’eau potable.
NB : La pauvreté absolue (incapacité pour un individu de satisfaire ses besoins élémentaires : se nourrir, se vêtir, se loger, se chauffer, faire subsister sa famille) s'évalue en monnaie et comme un minimum vital (1,90 $ par jour). La part des travailleurs du monde entier vivant dans l'extrême pauvreté a diminué de moitié au cours de la dernière décennie, passant de 14,3 % en 2010 à 7,1 % en 2019. Toutefois, en 2020, elle augmentera pour la première fois en deux décennies après la pandémie de COVID-19.
En France (et en UE) on utilise la notion de pauvreté relative. Le seuil de pauvreté est fixé par convention à 60 % du niveau de vie médian de la population. Il correspond à un revenu disponible de 1 158 euros par mois pour une personne vivant seule. 9,1 millions de personnes vivent au dessous du seuil de pauvreté en 2021.
- B. Les déséquilibres démographiques
Ensuite, des déséquilibres démographiques puisque la croissance de la population d’une nation est un important facteur de croissance économique. C’est ainsi que les pays émergents bénéficient du dynamisme de leur croissance démographique alors qu’à l’inverse, les pays développés entrent dans un « hiver démographique » à même de brider leur croissance économique.
- C. L’épuisement des ressources naturelles
Enfin, des déséquilibres écologiques puisque la volonté de croissance tous azimuts de l’ensemble des nations implique une pression inacceptable sur les stocks de matières premières et une diminution préoccupante de la plupart des ressources naturelles (pétrole, eau potable, minerais, stocks de poisson, forêts, épuisement des sols à cause de l’agriculture intensive...).
NB :
ne ressource renouvelable est une ressource naturelle dont le stock peut se reconstituer sur une période courte à l'échelle humaine de temps, en se renouvelant au moins aussi vite qu'elle est consommée.
C'est le cas par exemple de diverses ressources animales d'élevage ou végétales cultivées (biomasse), l'eau d'une nappe d'eau souterraine dont le niveau reste stable, de l'énergie éolienne et de l'énergie solaire. En ce qui concerne les ressources vivantes naturelles (gibiers, poissons, mais aussi humus, forêts primaires…), elles ne sont considérées comme renouvelables que si le taux de régénération est supérieur ou égal au taux d' exploitation, par la chasse ou la pêche.
Les projections actuelles montrent que le pétrole, qui a mis plusieurs dizaines de millions d'années à se former, sera épuisé au cours du xxie siècle. Cependant, le pétrole n'est pas la seule ressource non renouvelable. D'autres ressources risquent d'arriver à épuisement avant le pétrole, au rythme actuel de consommation : le terbium, le hafnium, l'argent, l'antimoine, le palladium, l'or, le zinc, l'indium, l'étain, le plomb, le lithium, le tantale, le cuivre, l'uranium, le nickel, etc1.
II La nécessité d’une nouvelle forme de croissance : le développement durable
- A. Le développement durable
Croissance et développement sont des notions interdépendantes. La croissance économique ne peut s’installer durablement que si elle s’appuie sur un développement robuste. Système éducatif performant, compétence de la main-d’œuvre, infrastructures adéquates sont autant d’éléments nécessaires à la création de valeur, à l’augmentation du PIB. En retour, le développement va pouvoir se nourrir de cette richesse créée pour améliorer de nouveau le niveau et les conditions de vie des agents. Le développement est une fin dont la croissance économique est le moyen.
Toutefois, l’utilisation de la croissance économique comme mesure de l’activité connaît des limites : la volonté de consommer toujours plus, d’améliorer sans cesse la croissance et le développement économique, peut en effet amener l’humanité dans une impasse. D’une part, parce que nos ressources sont limitées et que leur capacité à se renouveler n’est pas automatique : sans elles, la croissance et le développement sont impossibles. D’autre part, parce qu’une activité humaine trop intensive peut dégrader l’écosystème au point de rendre l’environnement difficilement vivable.
C’est pour pallier ces incomplétudes de la croissance économique que le concept de développement durable a été inventé. Il s’agit d’« un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs ». Ainsi, il affirme l’idée fondamentale selon laquelle le développement doit concilier croissance économique, respect des équilibres naturels de la planète et respect des équilibres sociaux : les trois axes du développement durable.
NB : Le concept de développement désigne l’ensemble des transformations techniques, sociales, territoriales, démographiques et culturelles accompagnant la croissance de la production. Il traduit l’aspect structurel et qualitatif de la croissance et peut être associé à l’idée de progrès économique et social.
NB : La production nécessitant une coopération internationale peut être nécessaire. Le climat, l'eau, l'air, la biodiversité, la sécurité internationale, la connaissance, mais également la stabilisation économique, financière ou monétaire internationale (Stiglitz, 1999) sont des biens publics mondiaux. Ces biens sont non rivaux, non exclusifs et mondiaux. Tous les pays ont intérêt a en profiter mais pas forcément à financer leur production.
- B. Les indicateurs de développement durable
Le développement durable nécessite des indicateurs pour quantifier chacune de ses dimensions économique, écologique et sociale. Les indicateurs les plus fréquemment utilisés sont l’indice de développement humain (IDH), l’empreinte écologique et le PIB vert.
L’IDH est calculé chaque année, depuis 1990, par le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD). Il synthétise trois indices spécifiques : un indice de niveau de vie (PIB par habitant), l’espérance de vie à la naissance et un indice de savoir (taux d’alphabétisation des adultes et le nombre moyen d’années d’études). L’IDH doit permettre d’évaluer les progrès accomplis et ceux restant à accomplir par les nations, de déterminer les domaines d’action prioritaires, et d’effectuer des comparaisons spatiales et temporelles du développement.
L’empreinte écologique mesure la surface productive nécessaire à une population pour répondre à sa consommation de ressources (nourriture, chauffage, habitat…) et à ses besoins d’absorption de déchets. L’empreinte écologique globale de l’humanité a pratiquement doublé au cours des 35 dernières années et dépasse de 20 % les capacités biologiques de la planète. L’empreinte par personne des pays à hauts revenus est en moyenne six fois plus élevée que celle des pays à faibles revenus.
Le PIB vert est un PIB corrigé des atteintes à l’environnement. Il s’agit d’ajouter au PIB les valeurs estimées de certains grands facteurs de bien-être, puis de retrancher les coûts estimés des principaux dommages sociaux et écologiques associés à notre mode de croissance. L’avantage du PIB vert est de pouvoir être directement confronté au PIB, en utilisant un outil de mesure coutumier : les unités monétaires.
- C. Les instruments du développement durable
Notre économie doit se diriger vers un développement durable ce qui impose une transition écologique (La transition désigne « un processus de transformation au cours duquel un système passe d'un régime d'équilibre à un autre »).
Des instruments (réglementation, normes, labels, taxations et permis négociables) incitent les agents économiques à intégrer les contraintes environnementales à leurs principales décisions économiques (production, consommation, investissement).
Les instruments fiscaux consistent à taxer les activités générant des externalités négatives et à subventionner celles générant des externalités positives.
Les instruments réglementaires consistent à interdire ou à limiter la production de certains biens ou services jugés nocifs.
Les instruments économiques visent à créer des marchés relatifs à ces externalités pour que les prix intègrent naturellement les nuisances générées (par exemple, le marché des permis d’émission de dioxyde de carbone mis en place suite au protocole de Kyoto).
L'accent peut être mis sur l'économie circulaire et l'économie collaborative. L'économie circulaire est un modèle de production et de consommation qui consiste à partager, réutiliser, réparer, rénover et recycler les produits et les matériaux existants le plus longtemps possible afin qu'ils conservent leur valeur. L'économie collaborative est définie comme une économie qui repose sur le partage ou l'échange entre particuliers de biens (voiture, logement, parking, perceuse, etc.), de services (transport de passagers, bricolage, etc.), ou de connaissances (cours d'informatique, communautés d'apprentissage, etc.), avec échange ...
Aussi le poids de l'économie sociale et solidaire (ESS) n'a de cesse de prendre de l'importance et semble adaptée au développement durable.
Le concept d'économie sociale et solidaire (ESS) désigne un ensemble d'entreprises organisées sous forme de coopératives, mutuelles, associations, ou fondations, dont le fonctionnement interne et les activités sont fondés sur un principe de solidarité et d'utilité sociale.
Ces entreprises adoptent des modes de gestion démocratiques et participatifs. Elles encadrent strictement l'utilisation des bénéfices qu'elles réalisent : le profit individuel est proscrit et les résultats sont réinvestis. Leurs ressources financières sont généralement en partie publiques.
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