Comment l'Etat peut-il intervenir dans l'économie ?

 

Thème 6 : l’Etat peut-il intervenir dans l’économie ?

I L’intervention de l’Etat

  1. Rôle et évolution

Le rôle de l’Etat en économie a fortement évolué au cours du XXème siècle. Les économistes sont partagés, deux visions s’opposent.

En France, l’Etat était avant la deuxième guerre mondiale, très peu interventionniste. Le rôle de l’Etat dans l’économie était minimal. On appliquait la doctrine du libéralisme au travers de laquelle l’Etat était cantonné aux fonctions régaliennes : défense, police, justice, diplomatie. Cette conception du rôle de l’Etat est appelée Etat-gendarme.

Des économistes tirent la leçon de la crise des années 1930 et promeuvent un Etat-providence. Cette conception du rôle de l’Etat va s’imposer après la 2ème guerre mondiale notamment en France. L’Etat assure des fonctions de régulation, d’allocation et de redistribution. Il s’agit par exemple pour l’Etat d’intervenir en cas de crise économique (notamment par le budget), de financer massivement des services publics (école, hôpitaux) et de lutter contre les inégalités sociales et la pauvreté. Rappelons à cette occasion que la France créé la sécurité sociale en 1945 et l’assurance chômage en 1958.

  1. Mesure du poids de l’Etat

Il est possible de mesurer le niveau de l’intervention de l’Etat dans l’économie au travers de deux indicateurs : le taux de prélèvements obligatoires, c’est le poids des impôts, taxes et cotisations par rapport au PIB et le poids des entreprises publiques (entreprises dont le capital est majoritairement détenu par l’Etat).

Le taux de prélèvements obligatoires est passé en France de 30% du PIB en 1960 à 45% aujourd’hui.

Selon l’Insee, l’Etat en France contrôlait en 2016 1702 sociétés employant 776 000 salariés (ex : SNCF, La Poste). Pourtant les entreprises publiques sont moins nombreuses que dans le passé. Depuis la fin des années 1980, de nombreuses entreprises publiques ont été privatisées (France télécom, TF1, Société Générale, Renault, Air France, …).

II Le budget de l’Etat

  1. Définition

Le budget est constitué de l’ensemble des recettes et dépenses de l’Etat. Il est voté chaque année par le Parlement (loi de finance).

Plus largement, les dépenses et recettes publiques sont le fait de l’Etat (administrations centrales), des collectivités locales et des administrations de sécurité sociale.

  1. En chiffres

En 2017 en € selon l’Insee : dépenses de l’Etat (492 milliards) ; collectivités locales (255 milliards) ; sécurité sociale (597 milliards)

Au total les dépenses publiques représentent 56,5% du PIB en 2017 alors que la moyenne européenne est de 45%. Cela fait de la France la championne du monde des dépenses publiques selon l’OCDE.

Il s’git surtout de dépenses de fonctionnement et notamment de la rémunération des fonctionnaires.  L’investissement public ne représente que 80 milliards d’€ en 2017.

En ce qui concerne l’Etat au sens strict, les principales dépenses sont en 2019 : l’éducation nationale (72 milliards), la défenses (44 milliards), la charge de la dette (42 milliards). Les principales recettes sont la TVA (139 milliards), l’impôt sur le revenu (70 milliards), l’impôt sur les sociétés (31 milliards).

Si l’on regarde l’ensemble des recettes publiques (Etat, collectivités locales, sécurité sociale), celles-ci correspondent au taux de prélèvement obligatoire : 44,7% du PIB soit presque 1 000 milliards d’€ en France en 2019 dont la moitié pour financer la sécurité sociale !

  1. L’équilibre

En France le budget des administrations publiques est déséquilibré. Le budget de l’Etat lui-même est déficitaire chaque année depuis 1975 !

Cela signifie que les dépenses publiques sont supérieures aux recettes publiques. Il y a donc un déficit public à financer chaque année. Comment ? L’agence France trésor, un organe du ministère de l’économie et des finances, est chargé d’emprunter au nom de l’Etat sur les marchés financiers. Ce déficit à financer était de -3% du PIB en 2019.

Mais l’accumulation des déficits chaque année entraîne le gonflement de la dette publique. Celle-ci est de 100% du PIB en 2019. Rappelons qu’une dette doit être remboursée et qu’elle fait courir des intérêts. La charge de la dette dans le budget de l’Etat est aujourd’hui la 3ème dépense de l’Etat derrière l’éducation nationale et la défense).

Un excès de dette peut entraîner la faillite de l’Etat.

III Les défaillances du marché et les défaillances de l’Etat

Les défaillances du marché sont des situations dans lesquelles les mécanismes de marché ne permettent pas une allocation optimale des ressources. Autrement dit, dans certaines situations, le marché ne permet pas de parvenir à un optimum social et économique.

  1. L’asymétrie d’informations

Dans une relation d’échange, une personne est mieux informée que l’autre personne. Lorsque cette asymétrie se généralise sur un marché, ce marché est défaillant car les choix ou décisions économiques des consommateurs ou des producteurs ne sont pas optimales. Les agents économiques commettent des erreurs. Le consommateur ne peut pas maximiser son utilité et le producteur ne peut pas maximiser son profit.

L’Etat doit donc, en tant que garant de l’intérêt général mettre en place une règlementation pour accroître l’information sur le marché (ex : diagnostics dans l’immobilier, contrôle technique automobile, composition des produits).

  1. Les biens publics

Contrairement aux biens privés qui peuvent être laissés à la régulation par le marché, les biens publics ont des caractéristiques qui oblige l’Etat à intervenir. Les biens publics sont non rivaux (la consommation d’un bien public par un agent ne réduit pas sa consommation par un autre agent) et non exclusifs (il est impossible d’exclure un agent de sa consommation). L’éclairage public, les phares côtiers, la sécurité sont des biens publics. S’ils étaient laissés à la régulation par le marché, ils seraient produits en quantité insuffisante car ils ne permettent pas à leurs producteurs d’en obtenir une rentabilité. L’Etat se substitue au marché et les finance grâce aux prélèvements obligatoires.

Les biens communs sont des biens publics « impurs » car ils sont non exclusifs mais rivaux. Les réserves de poisson en mer ou les forêts sont des biens communs. Ils nécessitent l’intervention de l’Etat pour être préservés de la surexploitation qui conduirait à leur disparition.

  1. Les externalités

Les activités de production et de consommation des agents économiques peuvent générer des effets économiques sur d’autres agents économiques. Par exemple, une entreprise industrielle peut créer de la pollution, une pollution qui sera négative sur la production d’autres biens et services comme le tourisme. Le problème est que ces externalités, ici la pollution, ne sont pas prises en compte par le marché. Rien n’oblige à priori le pollueur de dédommager les autres agents économiques.

Il revient donc à l’Etat d’intervenir pour favoriser les externalités positives et réduire ou supprimer les externalités négatives. L’Etat peut instaurer par exemple une législation antipollution.

D. Les marchés de concurrence imparfaite

Le marché concurrentiel intègre une caractéristique essentielle : l'atomicité (multitude d'offreurs et de demandeurs). Or, les marchés d'oligopole et de monopole ne présentent pas cette caractéristique. Le monopole comprend un seul offreur pour une multitude de demandeurs. Celui-ci peut donc fixer le prix qu'il désire afin de maximiser son profit. Le marché d'oligopole comprend quelques offreurs pour une multitude de demandeurs. Ces offreurs peuvent facilement s'entendre et se répartir les parts de marché ou fixer des prix élevés pour maximiser leurs profits.

Dans ces deux situations, il n'y a pas de réelle concurrence. L'Etat intervient alors par le droit de la concurrence pour que le consommateur ne soit pas victime de ces situations. L'Etat cherche à veiller à ce que les entreprises en situation de monopole ou d'oligopole ne profitent pas de cette situation. L'abus de position dominante est donc sanctionné par le droit, de même que les ententes illicites entre entreprises. Enfin, en cas de fusion d'entreprises, instaurant de fait un plus grand degré de concentration économique, l'Etat (ou la commission européenne sur le marché européen) peut interdire certaines fusions (opérations de concentration).

E. Les défaillances de l’Etat

L’Etat qui assure ses fonctions régaliennes ainsi que ses fonctions de régulation, d’allocation de ressources et de redistribution agit par ses représentants (élus et fonctionnaires). Ceux-ci prennent-ils toujours les décisions dans le sens de l’intérêt général ? Sont-ils toujours parfaitement informés ? Sont-ils obligés de parvenir à des compromis ? Sont-ils influencés par leurs propres objectifs et stratégies individuelles ?

Il apparaît évident, bien que la France soit un état de droit, libéral et démocratique, que L’Etat présente parfois des défaillances qui conduisent à des choix économiques non optimaux.

IV La politique économique

  1. Définition

La politique économique désigne l’ensemble des décisions et interventions de l’Etat dans l’économie. La politique économique cherche à atteindre des objectifs économiques et notamment la croissance économique, le plein emploi, la stabilité des prix et l’équilibre du commerce extérieur.

  1. Politique structurelle et politique conjoncturelle

La politique structurelle désigne les décisions visant à transformer le fonctionnement de l’économie (ses structures) sur le long terme. On pense à la politique énergétique, la politique industrielle, la politique des transports, la politique de la concurrence, la politique de régulation financière. Par exemple, la politique de la concurrence cherche à maintenir la concurrence sur les marchés en sanctionnant les abus de position dominante et les ententes illicites. Elle a justifié aussi la mise en concurrence d’activités qui relevaient auparavant de monopoles publics.

La politique conjoncturelle désigne les interventions à court de l’Etat dans l’économie. Il s’agit de la politique de relance en phase de récession et de la politique de stabilisation (rigueur ou austérité) en phase d’expansion économique. Ces deux politiques sont dites « contracycliques » puisqu’elles visent à « contrer » le cycle économique. La relance lutte contre la récession et la stabilisation cherche à maîtriser une croissance non inflationniste. Les deux composantes de la politique conjoncturelle sont la politique budgétaire et la politique monétaire.

  1. La politique budgétaire

La politique budgétaire consiste pour l’Etat à utiliser son budget pour agir sur les variables économiques. En phase de récession (ex : 2009, 2020), l’Etat augmente ses dépenses publiques et réduit les prélèvements obligatoires. Cela permet de relancer (politique de relance) l’activité économique. Keynes, économiste britannique a prôné l’intervention de l’Etat notamment par le budget à partir de 1936. Ce type de politique va se développer surtout après la 2ème guerre mondiale. De fait, le déficit public est utilisé pour faire face à une récession.

En phase d’expansion économique, le risque est la « surchauffe » de l’économie. La demande est dynamique et l’offre a du mal à faire face. Le risque est l’accélération de l’inflation (hausse des prix). L’Etat mène alors une politique de stabilisation en réduisant les dépenses publiques et en augmentant les prélèvements obligatoires. Cela permet aussi de rééquilibrer le budget de l’Etat.

NB : Les politiques de demande visent à agir sur la demande des ménages (ex : hausse du pouvoir d’achat) pour relancer la consommation et donc la croissance. Les politiques d’offre visent à agir sur l’investissement des entreprises pour favoriser la croissance (ex : baisse des prélèvements obligatoires).

  1. La politique monétaire

La politique monétaire de la BCE (banque centrale européenne) consiste à agir sur la quantité de monnaie en circulation grâce au taux directeur. L’objectif essentiel de la BCE est de rechercher la stabilité des prix à moyen terme en zone euro (inflation proche mais inférieure à 2%/an).

Pour la BCE, le niveau des prix dépend surtout de la quantité de monnaie en circulation. Si la quantité de monnaie (masse monétaire ou M3) augmente plus vite que les besoins de l’économie (PIB), on assiste alors à une hausse des prix (inflation). Sachant que l’essentiel de la monnaie est créé par les crédits bancaires, la BCE doit donc agir sur les crédits bancaires pour contrôler la quantité de monnaie et donc le niveau des prix.

En phase de récession, la BCE peut réduire le taux directeur car il n’y a pas de risque d’inflation. Les banques commerciales peuvent alors réduire le niveau des taux d’intérêts auprès de leurs clients (entreprises, ménages). Cette baisse des taux incite les agents économiques à emprunter pour financer des dépenses d’investissement et de consommation. Cela soutient donc l’activité économique.

En phase d’expansion économique, l’accélération de la demande peut conduire à la hausse de l’inflation. La BCE doit donc réduire la création monétaire liée aux crédits. Donc, la BCE relève le taux directeur. Les banques commerciales doivent donc répercuter cette hausse vis-à-vis de leurs clients (entreprises, ménages).

  1. Les contraintes européennes

L’appartenance de la France à l’Union Européenne et à la zone Euro entraîne certaines contraintes.

La politique budgétaire de la France est limitée par le pacte de stabilité et de croissance. Le déficit public annuel des administrations publiques ne doit pas dépasser 3% du PIB. La dette publique ne doit pas excéder en principe 60% du PIB. Il s’agit pour les pays membres de la zone euro de respecter une discipline budgétaire afin d’éviter que certains pays soient obligés de payer pour d’autres qui seraient trop endettés.

La politique monétaire est du ressort de la BCE au niveau de toute la zone euro. La BCE est, de plus, indépendante du pouvoir politique. Les Etats et gouvernements ne peuvent pas exiger d’elle une certaine politique (sauf à renégocier le traité instaurant la BCE et la monnaie unique). En principe, la BCE n’est pas autorisée à financer les déficits publics des Etats membres.

Aussi, l’intégration européenne exige une plus grande coordination des politiques économiques. Les Etats européens cherchent donc, que ce soit sur un plan conjoncturel ou structurel, à se coordonner pour rendre la politique économique plus efficace.

V La politique sociale

  1. Définition

La politique sociale désigne l’ensemble des décisions et interventions des administrations publiques pour atteindre des objectifs sociaux (baisse des inégalités, favoriser la justice sociale, lutte contre la pauvreté et l’exclusion).

  1. La redistribution

La redistribution ou répartition secondaire des revenus permet de réduire les inégalités de la répartition primaire et de financer les services publics.

On parle de redistribution verticale lorsqu’il s’agit de réduire les écarts de revenu entre les ménages les plus aisés et les ménages les plus modestes.

On parle de redistribution horizontale lorsqu’il s’agit de soutenir les ménages atteints par des risques sociaux.

La redistribution comporte deux étapes : les prélèvements obligatoires et les revenus de transfert. Dans un premier temps, les APU prélèvent des impôts, taxes et cotisations auprès des agents économiques. Ensuite, ces richesses sont redistribuées sous forme de revenus de transfert (prestations sociales ou revenus sociaux) et de services publics.

Pour un ménage : revenus primaires – PO + RT = Revenu disponible.

La redistribution permet d’augmenter le revenu disponible des ménages les plus modestes et à l’inverse de réduire celui des ménages les plus aisés.

  1. La protection sociale

La protection sociale est l'ensemble des mécanismes de prévoyance collective qui permettent aux individus ou aux ménages de faire face financièrement aux conséquences des risques sociaux, c'est-à-dire aux situations pouvant provoquer une baisse des ressources ou une hausse des dépenses (vieillesse, maladie, invalidité, chômage, accident du travail ...).

La protection sociale relève en France d’une logique d’assurance (modèle bismarkien) et d’une logique d’assistance (modèle beveridgien). L’assurance nécessite la contribution des assurés (ex : allocation chômage). La logique d’assistance est fondée quant à elle sur la solidarité nationale. Dans ce cas même, tout le monde peut être aider (ex : RSA, AAH, complémentaire santé solidaire (ex CMU)). La logique d’assurance est financée par les cotisations sociales alors que la logique d’assistance est financée par l’impôt.

La France est le pays qui dépense le plus pour la protection sociale en Europe (34,1% du PIB). La moyenne européenne se situe à 27,9% du PIB (eurostat 2017).

  1. Les prélèvements obligatoires et la réduction des inégalités

Les impôts forfaitaires ne réduisent pas les inégalités. Par exemple, la redevance audiovisuelle est identique pour tous.

Les impôts proportionnels sont de loin les principales recettes fiscales des administrations publiques. La TVA et la TICPE sont des pourcentages prélevés sur les dépenses de consommation des ménages. Les taux sont identiques pour tous les ménages quelle que soit leurs revenus. Ces impôts ne réduisent pas les inégalités.

Enfin, les impôts progressifs réduisent les inégalités. Dans ce cas les taux de prélèvement sont croissants avec le niveau de richesse d’un ménage (ex : impôt sur le revenu, impôt de solidarité sur la fortune immobilière, droits de succession). Mais ces impôts ne représentent qu’un poids très faible en France. L’IR a rapporté 72 milliards d’€ à l’Etat en 2016 et l’ISF 5,1 milliards ; La TVA a rapporté 154 milliards d’€ et la TICPE 30 milliards.

  1. Prélèvements obligatoires : vision générale

En 2017, les administrations de sécurité sociale bénéficiaient de 552 milliards d’€ de PO (surtout des cotisations sociales : 358 milliards) soit 24,1% du PIB ; L’Etat bénéficiait de 324,9 milliards d’€ (surtout des impôts) soit 14,2% du PIB ; et les collectivités locales bénéficiaient de 142,7 milliards d’€ soit 6,2% du PIB.

On constate donc que l’essentiel des prélèvements obligatoires financent notre régime de protection sociale (sécurité sociale), d’autant plus que des dépenses de l’Etat viennent compléter la protection sociale et financer les services publics.

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chapitre 11: Les politiques sociales

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